jeudi 31 mai 2007

La new-gen va-t-elle tuer le retro-gaming ?

Grodito# 7 - La new-gen va-t-elle tuer le retro-gaming ?

Voilà une question que je me suis posée en lisant certaines discussions sur le forum rétro de Grospixels, mais aussi en constatant la désertion de ce dernier.

Nous sommes nombreux ici à jouer aux jeux anciens, par nostalgie d'une part mais aussi et surtout parce que nous estimons que leur gameplay est encore, pour certains, absolument inégalé par les dernières sorties. Les consoles post-16 bits nous ont apporté la 3d, les jeux "cinématographiques", et des techniques de représentation proches du réel. Mais toutes les consoles récentes, de la Playstation à la Game Cube, ont imposé des contraintes techniques aux créateurs dans ce qu'ils voulaient nous montrer en 3d, alors que la SNES ou la Megadrive n'avaient quasiment aucune limite dans le domaine de la 2d (en dehors peut-être du nombre de couleurs). On a donc connu, vers la "fin de vie" de ces deux consoles, des jeux dont on a longtemps pensé (ou voulu penser) qu'ils resteraient à jamais des maîtres étalons dans leur genre respectif et ne pourraient jamais être dépassés.

Ce fut par exemple le cas de Yoshi's Island. Cette patte graphique, cette émotion transmise du créateur au joueur, ont fait écrire à la presse de l'époque que ce jeu éclipsait à lui tout seul toutes les sorties 32-bit de Noël 95. Et ce fut effectivement le cas. Qui se souvient vraiment de Toshiden, Twisted Metal ou Motor Toon Grand Prix ? Yoshi Island a eu droit à une réédition sur GBA et à une suite sur Nintendo DS, preuve de la marque indélébile qu'il a laissée, dans les charts comme dans l'imaginaire collectif. A l'opposé de ce triomphe, Star Wing tentait le pari de la 3d sur la même console. Malgré ses qualités ludiques, ce jeu semblait revenir à des graphismes "cubiques" d'un autre temps. On comprit alors qu'une nouvelle génération de consoles allait voir le jour, mais on était loin de se douter que la 3d allait, de longues années durant, représenter un frein à l'épanouissement esthétique des jeux. Un pas en avant, deux pas en arrière...


Aujourd'hui, alors que les consoles new-gen ont déjà fait étalage de ce dont elles sont capables, on arrive au stade où les créateurs ne sont quasiment plus limités par le hardware pour retranscrire leurs visions, où des questions comme "ce boss est-il trop gros pour être affiché par la console" semblent ne plus se poser. Un jeu comme Gears of War permet des batailles urbaines d'une intensité jamais ressentie auparavant, Table Tennis est incontestablement le meilleur jeu de ping pong depuis 25 ans, et très objectivement un amateur de basket "fun" pourra difficilement dire que l'"antique" NBA Jam est "mieux" que NBA Street. Alors, le retrogaming comme "recherche des meilleurs jeux sans considérations générationelle" est il mort ? Ne va-t'il rester à moyen terme que la mouvance "rétro-nostalgique T-shirt ATARI" ?

En dehors des considérations purement grospixelo-centrées, cette question en soulève une autre : un jeu réalisation sans limitation autre que le temps et le coût de développement, donc a priori sans contrainte technique majeure, est il intrinsèquement meilleur qu'un jeu dont on sait que ses auteurs ont du composer avec un hardware faiblard, même pour son époque dans certains cas ? J'ai personnellement la naiveté de croire que l'ère de l'esbroufe technique touche à sa fin, que nous ne subirons plus de jeux comme Forsaken, dont le seul interêt était de montrer que les développeurs maitrisaient à présent les effets de lumière. Néanmoins subsiste le risque pour les créateurs de se "perdre" dans la montagne de choses qu'ils peuvent offrir, et dans ce cas là on peut estimer qu'un hardware limitatif peut les canaliser.

On pourra me rétorquer que les anciens jeux n'ont jamais été aussi visibles, que la pratique du retro-gaming est totalement entrée dans les moeurs grâce à des supports comme le Live-Arcade, le PS Network ou la Virtual Console. Mais un tel système, rigoureusement légal et moins underground que l'émulation, n'a-t-il pas ses propres vices ? Ne risque t'il pas de mettre en l'évidence dans l'esprit des gens la différence entre les "vrais" jeux (ce qu'on achètent en DVD et en grande surface) et les "petits" jeux (qui ne pèsent que quelques centaines de Ko et qu'on télécharge contre 5€ comme on achèterait une sonnerie de téléphone portable ou un remake en java) ? En plus de cette dévalorisation due au support, ont peut penser qu'il y a un danger certain à laisser un patrimoine vidéoludique être "sélectionné", trié par des gens autorisés avant d'être montré au plus grand nombre ? Qui se souviendra au final qu'il existait sur PC Engine non seulement PC Kid, mais aussi Toilet Kid, sur SNES non seulement Supe Mario Bros, mais aussi Ren & Stimpy Show ?

En relisant mon texte, et en observant la manière (parfois très méprisante) dont ont été accueillis les rééditions récentes de jeux comme Centipede, Gyruss ou Xevious, j'ai presque envie de comparer le sort actuel des jeux anciens vendus en ligne à celui de personnes âgées que leurs enfants et petits enfants vont voir une fois par semaine à l'hospice. Et pourtant, comme ces vieillards, ils ont encore tant à nous apprendre..

7 commentaires:

Anonyme a dit…

le rétrogaming est immortel, regarde sur 360 le xbox live arcade. Le retrogaming c'est nous, nos coup de coeur, nos souvenirs et nos crises de nerfs. Dans 10 ans Gow fera peut-être partie du rétro mais ça on verra.

Ps: je reviens bientôt sur le live. Remets mon bonjour aux autres.

dante2002 a dit…

Pas de problème je passe le bonjour :)

Complayment d'Objet Direct a dit…

Il faut voir qu'il n'a rien d'insidieux dans l'article parce que tout simplement le retrogaming tend à disparaître puisque nous-mêmes nous tombons. OK. Il suffit pour comprendre de s'essayer par exemple à:
- Gears of War monstre de jouabilité, d'émotion, de solidarité, d'engagement, intégrant un mode coopératif en écran splitté,
- God of War 2 qui promet la lune & le soleil à la fois et parvient à les obtenir,
- Dead Rising,
pour constater ce retour au mélange de bestialité et d'intelligence caractéristique de l'époque pré-playstation plutôt pro-occidentale et 2d, appuyé par le fait que nous avons parfaitement intégré ce qu'était un jeu 3d, vers quoi il pouvait tendre dans son graphisme et son ergonomie dans l'interface et la jouabilité, que la 3d quoi qu'on en dise, a un impact émotionnel éminemment plus important en tout contexte car elle permet instantanément d'insérer le plan du jeu dans d'autres dimensions ce qui favorise la mise en scène et l'immersion.

Ces 3 jeux cités, étant d'immenses succès commerciaux, ils seront étudiés dans leurs mécanismes par le reste de l'industrie. Mais je dis que leurs mécanismes sont en fait déja présents dans les jeux anciennes générations (pré-valeurs nippones), le recours au retro-gaming ne sert alors que dans une mise en abîme pour comprendre cette New gen, pas vraiment pour les différencier.
Car ne suffit-il pas de jouer à Lost Planet pour comprendre ce qu'il a d'un contrat?
Et si le grand public ne se soucie pas de Toilet Kid, quelqu'un l'a t-il déja fait auparavant?

Vous tentez une morale au lieu d'affirmer qu'en douce, c'est un héritage que vous liquidez car vos gardez en vous, tout de même, l'assurance que l'on s'écarte doucement mais sûrement de l'ère du Rpg japonippon et de la Metal Solidification de l'industrie pour revenir au temps d'un jeu vidéo relâché du trou de balle en 3d 4 étoiles.

L'horizon s'éclaircit.


J'explique que cet intérêt trouvé, soudain, au jeu vidéo New gen est en parti causé par une volonté inconsciente ou conditionnée de se recentrer vers un Atlantisme viril (dans le sens prêt à agir si le besoin s'en faisait sentir) ou une volonté manifeste des médias de nous y faire croire.

On a jamais eu bizarrement autant d'attente pour la production vidéoludique américaine depuis 20 ans, on lui découvre la superbe de ses Mass Effect, Bioshock, une certaine conviction, et elle porte à elle seule ce nouvel espoir, cette nouvelle génération de jeux vidéos.
On relègue l'exportation de la culture japonaise (ou d'une culture extérieure) à ce qu'elle a de plus bas, léger, de moins influençable (biens à faible valeur ajoutée ou ne portant pas de hautes valeurs, la Wii) ou de mieux contrefait (Suda 51, transport de valeurs strictement similaires).

C'est à dire qu'en intégrant dans les jeux vidéos notre actualité, la "normalité" des rapports sociaux, un certain conditionnement sur des détails, etc...que l'on note que l'on apprécie ça, on signe en reconnaissance de la primauté de notre culture.

Ce n'est pas pour soulever un débat mais s'il y a quelquechose de sournois, ça doit se trouver ici. Donner le monopole à l'un, un recentrage civilisationnel pour quelques intérêts géopolitiques parmi d'autres.

Je cherchais le rôle de la Wii, 360, la PS3 (concurrent d'un réseau de diffusion de hautes valeurs) car intrigué par le traitement qu'en faisaient les médias. J'attribuais, à tort, aux deux premiers un penchant sexuel alors qu'il n'est "que" purement civilisationnel.


Mais pour finir, il est clair que les budgets d'aujourd'hui présentant un réel risque financier, on ne construit le succès d'un jeu que sur des éléments purement mesurables et objectifs (level-design, moteur graphique, gameplay), les musiques de jeux ne tendent elles-mêmes alors qu'à devenir de simples musiques d'ambiance (ou orchestées symphoniquement par des ex soviets discount, ce qui n'a aucun sens en soi mais agit comme un cache-misère) et puisque l'apport artistique, dans ce cas, est proche du néant, il est tout autant "rationnalisé" que les autres secteurs de production.

J'étais surpris de constater que depuis 1999, il n'y a plus aucune musique que je retienne.
Donc on est loin de cette époque où le son s'imposait et où avec Street of Rage 2 on avait déja un jeu super mais grâce aux musiques, on échouait à trois-quatre mètres du Paradis d'Eden.
Donc voilà, ça n'ira peut-être pas mieux puisque la musique étant livrée à l'inspiration de l'artiste, trop subjective et instable, elle peut faire capoter un projet à 15 millions d'Euros. Depuis que les jeux promettent tout, on parsème de râles ça et là et, pour croiser votre topic, c'est là le grand défaut envisageable de la New Gen.

Complayment d'Objet Direct a dit…

C'est un beau sujet, dans le timing, mais pardonnez ma plume sauvage.


merci

dante2002 a dit…

Voilà au contraire un très intéressant commentaire.

dante2002 a dit…

Tu devrais venir exposer ton point de vue sur le forum de grospixels :)

Complayment d'Objet Direct a dit…

C'est comme ci malgré votre âge (que je ne connais pas), vous endossiez une nouvelle identité.